Figures de style

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    Les gestes de montage accomplis par Pelechian afin de faire naître de la poésie peuvent être assimilés à de véritables figures de style poétiques littéraires ; ainsi l’on reconnaît dans ses films des métaphores, allégories, accumulations, gradations, métonymies, symboles. La répétition joue un rôle capital dans cette écriture poétique et Pelechian crée aussi, grâce à son montage à distance, l’équivalent de rimes.

METAPHORE

    Le montage d’une séquence suivant le principe de la boucle (répétition d’un plan avec alternance de lecture avant et de lecture arrière) peut faire naître la métaphore  : un plan de foule (voir l’extrait) devient littéralement une marée humaine, soumise aux mêmes mouvements que ceux de la mer, flux et reflux.

ACCUMULATION

    Dans les séquences qui symbolisent la reconstruction dans le film Nous, des séries de plans de mains déplacent des pierres : les premières mains les font seulement rouler, les suivantes continuent le geste. L’accumulation créée par la répétition de ces gestes est ainsi doublée d’une évolution, d’une gradation.


 

Séquence de reconstruction de  Nous - accumulation et métonymie

RIME 

    Dans un film de Pelechian, le même plan, ou la même séquence, peut être répété à un intervalle plus ou moins important et peut fonctionner comme les rimes d’un poème. Pour Vincent Amiel, les rimes dans les films sont des « répétitions de loin en loin, similitudes approximatives, sensations qui ouvrent pour la mémoire un espace différent, et projettent en d’autres lieux des sentiments qui palpitent à nouveau » - Vincent Amiel, Esthétique du montage, Armand Colin, 2005, p. 75. Les répétitions à la base de la théorie du montage à distance fonctionnent comme des rimes.

    Ainsi, la séquence de la chute du berger des Saisons et le plan de la fillette dans Nous sont de bons exemples de rimes.

   

    Dans Nous, le plan de la fillette rime avec la seconde occurrence de ce même plan au milieu du film, puis avec le plan des balcons à la fin du film. Si, dans le premier cas, la rime est évidente car d’ordre visuel et sonore, puisque le plan est identique, ainsi que la musique qui l’accompagne, elle devient uniquement sonore dans le second cas, mais, du coup, elle s'enrichit puisque ce ne sont plus deux éléments qui riment, mais trois : la musique, le plan du balcon et la fillette (la fillette, absente matériellement à la fin du film, mais quand même présente dans l’esprit du spectateur).

METONYMIE (LA PARTIE POUR LE TOUT)

    Les gros plans de pierres soulevées et de marteaux piqueurs sont montés dans le film Nous afin de véhiculer l’idée des multiples constructions ou reconstructions de la capitale Erevan, ou de tout le pays.