La théorie de la distance

et l’image absente

Le montage à distance >  La théorie de la distance et l’image absente

 

      « Les "mécanismes" du montage à contrepoint ont été entièrement conditionnés par un seul objectif : exprimer les idées qui me touchent et transmettre au spectateur ma position philosophique.» Artavazd Pelechian - Le montage à contrepoint, ou la théorie de la distance, Trafic, n°2, printemps 1992.


CREER UNE DISTANCE

    Pelechian choisit de disjoindre des plans que d’autres cinéastes juxtaposeraient. Il crée une distance entre deux plans qu’il qualifie d‘ « importants », afin d’augmenter, grâce aux plans intermédiaires, leur signification. Ces deux plans, ou séries de plans « se parlent à travers toute la chaîne des plans qui les relient ». A. Pelechian in Entretien avec Pelechian réalisé par François Niney en mai 1991 pour Les Cahiers du cinéma, n°454, avril 1992.

     

MONTER UNE IMAGE ABSENTE

    En poussant à l’extrême sa théorie de la mise à distance, de la disjonction, Pelechian arrive à la suppression de l’image : « une image peut être absente mais présente par son aura. Personne n’a encore fait de montage avec des images qui n’existent pas. C’est un peu ce que j’essaye de faire dans l’architecture de mes films : rendre visible au spectateur des images qui n’y sont pas. Une représentation absente peut être encore plus forte. La possibilité d’existence irréelle d’une image absente, c’est ce qui fait le mystère du montage à distance. » A. Pelechian in Entretien avec Pelechian réalisé par François Niney en mai 1991 pour Les Cahiers du cinéma, n°454, avril 1992

Théorie de la distance et image absente

L’IMAGE DU CHAPELET DE BARTHELEMY AMENGUAL :


Pour expliquer la théorie de Pelechian, Barthélemy Amengual utilise une comparaison éclairante : « un film de Pelechian est construit à l’image du chapelet, une grosse perle séparant périodiquement des séries de perles plus petites. Les grosses perles sont les « séquences de soutien », les petites, qui se distribuent entre elles, les « séquences indépendantes ». Les séquences de soutien sont en nombre limité : deux, trois, quatre. Elles comptent peu de plans ; elles reprennent régulièrement quelques-uns des plans des séquences de soutien précédentes. Elles fonctionnent en refrain. Entre elles, les séquences indépendantes, parfois réduites à un unique plan, obéissent aux combinaisons les plus variées dont la loi générale est la rapidité unie à la répétition.»

Barthélemy Amengual, « Sur cinq films d’Artavazd Pelechian », Cahiers de la cinémathèque, n°67/68, décembre 1997.

    Comme tout artiste, Pelechian cherche, au moyen de son art, à exprimer au mieux ses idées, ses pensées. Mais le montage pratiqué de manière classique ne le satisfaisait pas. Aussi, comme un poète crée de nouvelles associations de mots, un peintre crée de nouvelles associations de couleurs, de formes, il a inventé un nouveau montage : le montage à distance ou à contrepoint.